La première chimio – Côté Mère

L’année 2007 débute et les examens pré-chimio commencent : sanguins, cardiaques… J’ai l’impression que je rentre dans un cyclone et que je n’en sortirai jamais. Il faut que je sois dans la meilleure forme possible pour pouvoir commencer ma 1ère chimio et qu’elle soit effective. Je me décide également à me faire couper les cheveux le plus court possible : les infirmières me l’ont conseillé lors de mes hospitalisations, en vue de leur perte vers la 3ème chimio, et c’est une étape complexe.

Je ne suis plus maîtresse de ma vie qui s’articule autour de la lutte contre cette « putain » de maladie qui a envahi mon corps insidieusement : le cancer va devenir « mon » cancer, et va occuper une trop grosse partie de mon quotidien durant plusieurs mois.

Je rencontre aussi le médecin oncologue qui va coordonner ce protocole. Le seul point positif est que je reste dans le même hôpital à Bordeaux, où j’ai été opérée, ce qui me permet de mieux me repérer.

Une nouvelle épreuve m’attend : la pose de la CIP, sorte de « prise » pour perfusion sous-cutanée, afin de pouvoir effectuer l’injection à chaque séance de chimiothérapie. Un soupçon de lucidité (je suis dans un état second provoqué par un très grand stress) au bloc, me fait demander au chirurgien de ne pas me la poser dans mon décolleté (je me rappelle que mon papa l’avait eu dans le creux au niveau de l’épaule), infime sentiment de coquetterie féminine.
Mais mon voeu n’est pas exaucé, le chirurgien semble pressé et peu attentif à ma requête, et je repartirai du bloc avec cette chose insérée au dessus de mon sein droit, en plein décolleté. Heureusement l’infirmier qui assiste est adorable et tente de me rassurer et d’apaiser ma peur viscérale.

Ce corps étranger m’est déjà insupportable, alors qu’il est installé pour faciliter les soins. Le détail sordide, c’est un papier de garantie fourni à la suite de la pose de la CIP, m’informant que je suis censée la garder bien au-delà des séances de chimio, en prévision d’éventuelles autres séances ou de rechute. Parfait pour garder confiance en l’avenir.

Et puis la première séance de chimio arrive, et le stress de l’inconnu avec. L’infirmière me rassure. Je ne me rappelle avoir souffert durant l’injection, du moins pour la première.
A la fin de la séance, je me dit « plus que cinq ». Le temps de repos entre 2 séances sera de 3 semaines, si tout va bien.

Je suis rentrée chez moi au Pays Basque après la chimio, mon compagnon est auprès de moi et me réconforte.
Seulement une dizaine de jours plus tard, exactement le jour de la date anniversaire de la mort de mon papa – drôle de coïncidence, sous la douche une touffe de cheveux commence à tomber et c’est une nouvelle douleur psychologique qui me transperce. Je ne m’y attendais pas du tout, on m’avait dit que ça n’arriverait qu’après la 3ème séance, c’est trop tôt.
J’appelle ma fille. Je ne veux pas la traumatiser, je lui ai un peu expliqué. Elle a 19 ans et nous sommes très proches mais je ne sais pas comment elle vit « ma » maladie depuis le début, et quand elle va me revoir je ne serai plus comme avant. Rien ne sera plus comme avant, d’ailleurs…

Je réunis le peu de force intérieure que j’ai en moi et je décide de me faire raser la tête par une coiffeuse à domicile.
Je voyais mes cheveux tomber peu à peu, chaque mèche par terre transperçant mon coeur.
Lorsque je voulus regarder dans un miroir, l’image qu’il me renvoya fut celle d’une inconnue.
Et ce ne fut que le début d’une transformation tant physique que physiologique et morale.

Je venais de perdre mon identité.

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marie-christine

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